Aux amoureux de la néphrologie, je vous souhaite la bienvenue dans cet article où nous allons explorer de manière beaucoup plus générale ce que sont les néphropathies glomérulaires.
Imaginez un instant que vous ayez besoin d’eau mais pour lequel, vous n’êtes pas sûr de sa pureté. Hum ! Certains penseraient directement à échanger cette eau par quelque chose d’autre n’est-ce pas ? Mais, essayons un peu de corser l’équation en mentionnant que c’est la seule source d’eau que vous possédez. Etrange n’est-ce pas ? Mais faites-moi confiance, vous comprendrez sans doute pourquoi.
Pour les plus malins dans l’histoire, ils penseraient peut-être à filtrer et stériliser cette eau. Alors oui, c’est à cela que servent aussi les reins : désintoxiquer votre organisme en éliminant les toxines issues ou pas de son métabolisme.
Dans notre étude sur les pathologies qui intéressent les reins, nous allons parler de ce que l’on appelle : les néphropathies glomérulaires.
Nous aborderons d’un point de vue général ce que sont que les néphropathies glomérulaires, mais également une de ses entités que l’on nomme : Syndrome néphrotique.


Le Glomérule (ou flocculus) constitue la partie du néphron (unité structurale et fonctionnelle du rein) responsable de la première étape de filtration des urines. Elle aboutit à la formation d’un ultrafiltrat ou urine primitive qui n’est rien d’autre que le résultat que d’un transfert passif unidirectionnel d’une grande quantité de plasma des capillaires vers la chambre urinaire.

La barrière glomérulaire est constituée des éléments suivants :
- Cellules endothéliales
- Membrane basale glomérulaire
- Fentes ou pores qui sont des espaces entre les prolongements des podocytes, les pédicelles
La barrière glomérulaire empêche le passage des macromolécules et des globules rouges dans les urines, ceci explique donc l’absence des globules rouges dans les urines. En cas d’altération de celle-ci, on peut donc observer une protéinurie, voire une hématurie microscopique.
Les Néphropathies glomérulaires constituent un ensemble des pathologies caractérisées par une atteinte du glomérule. Selon les causes, elles sont classées en 2 types :
- Glomérulopathies primitives : sans atteinte extra-rénales
- Glomérulopathies secondaires : consécutives d’une maladie a priori extra-rénale ou générale.
Diagnostic
L’histologie représente l’examen clé du diagnostic des néphropathies glomérulaires. L’on peut évoquer une glomérulopathie devant les signes suivants :
- Protéinurie : peut être détectée à la bandelette urinaire (albumine +++)
- Hématurie : microscopique, sans caillot ni douleurs
- HTA
- Œdèmes
- Insuffisance rénale
Devant un patient chez qui la clinique évoque une pathologie glomérulaire, il sied d’identifier le syndrome qui y est associé et de définir la pathologie sous-jacente en cause. Voici en marge quelques syndromes glomérulaires :
- Syndrome néphrotique
- Syndrome néphritique
- Syndrome d’hématurie récidivante
- Syndrome de glomérulopathie rapidement progressive
- Syndrome de glomérulopathie chronique
Dans le cadre cet article, nous aborderons beaucoup plus spécifiquement le Syndrome néphrotique.
Syndrome néphrotique
Avant de continuer, il est important pour nous de définir ce qui suit : le syndrome néphrotique est de définition purement biologique, quoi qu’il s’associe aussi à un contexte clinique.
Il est défini donc par ceci :
- Protéinurie > 3g/24h
- Hypoalbuminémie <30g/l
- Hypoprotidémie <60g/l
Par ailleurs, ce syndrome peut être soit pur ou impur en fonction de la présence de l’un des facteurs suivants :
- HTA
- Hématurie
- Insuffisance rénale
Si au moins l’un des facteurs ci-dessus est présent, le syndrome est dit : impur.
Cliniquement, le syndrome néphrotique se caractérise par ce qui suit :
- Oedèmes : mous, indolores, déclives et prenant le godet. Selon le contexte, un tableau d’anasarque (épanchement des séreuses) peut être observé.
- HTA
Histologie (Ponction Biopsie Rénale)
L’histologie représente l’examen de choix pour le diagnostic étiologique des néphropathies glomérulaires. Elle a un triple intérêt : diagnostique, thérapeutique et pronostique et est indiquée sous les conditions suivantes :
- Chez l’adulte souffrant d’un syndrome néphrotique
- L’enfant <2 ans et >10 ans
- Syndrome néphrotique cortico-résistant (voir plus bas)
- Syndrome néphrotique impur (voir plus bas)
Pour ne rien oublier, prenons un exemple plutôt simple, celui de 3 types de patients que vous recevez en consultation. Pour le premier, il s’agit de Monsieur Kalubi, diabétique connu chez qui le fond d’œil décèle la présence d’une rétinopathie diabétique et la bandelette urinaire ne ramène pas d’hématurie.
Pour le second, c’est Madame Justine qui souffre d’une amylose documentée à la biopsie des glandes salivaires. Et enfin, Monsieur Kayenga qui vous rapporte une glomérulopathie héréditaire dans sa famille.
Chers professionnels de santé, que ce soit pour Monsieur Kalubi, Madame Justine ou Monsieur Kayenga, la Ponction Biopsie Rénale n’est pas indiquée dans ces contextes.
Prenons un deuxième exemple de figure : vous vous retrouvez aux urgences devant un patient X qui consulte pour des œdèmes des membres inférieurs, avec une HTA quasiment mal contrôlée. Un autre cas est celui d’un patient Y chez qui le médecin aux urgences vous suggère une PBR ; mais avant, vous demandez à faire un bilan de crase et vous remarquez un trouble de la coagulation.
Le principe est simple : jamais de Ponction Biopsie Rénale (PBR) pour ces patients X et Y tu feras.
Le troisième cas est celui d’une jeune dame Z suspecte aussi d’un syndrome néphrotique, elle a des œdèmes, une HTA. Son bilan de crase vous revient normal, son HTA est bien contrôlée. Juste avant de procéder à la biopsie, vous décidez de faire votre petite échographie et vous constatez une anomalie au niveau des reins, notre patiente n’a qu’un seul rein.
Encore une fois, le principe est simple : jamais de PBR, tu ne réaliseras pour la patiente Z
Pour résumer, la PBR est contre-indiquée dans les conditions suivantes :
- HTA mal contrôlée
- Trouble de la coagulation
- Anomalie rénale : rein unique, polykystique, lithiases rénales, reins de petite taille
Vu qu’on en parle, quelles pourraient être les complications d’une ponction biopsie rénale ?
Vous faites bien de poser la question, en somme, une PBR expose aux complications suivantes :
- Hématurie macroscopique
- Fistule artério-veineuse
- Hématome
Complications du syndrome néphrotique
Parmi les complications du syndrome néphrotique, on peut citer ce qui suit :
- Dyslipidémie
- Thromboses : fuite de l’antithrombine III et une augmentation de la synthèse des facteurs de coagulation hépatiques
- Risque de surdosage : la fuite de l’albumine expose à une augmentation de la fraction libre des médicaments prescrits, d’où l’intérêt de l’adaptation de la posologie
- Dénutrition : par fuite des protéines
- Risque infectieux : par fuite des immunoglobulines
Etiologies du syndrome néphrotique
Vous savez maintenant ce que c’est qu’un syndrome néphrotique, sa clinique, ses complications… Le contexte étant maintenant ciblé, il est important de définir les pathologies qui peuvent en être la cause première.
Parmi les étiologies, on peut citer :
- Les causes primitives :
- Lésions glomérulaires minimes (LGM) : il s’agit d’un syndrome néphrotique sans lésion décelable à la microscopie optique. Au microscope électronique, on observe une disparition des pieds des podocytes (les pédicelles). La pathologie est fréquente chez les enfants et est corticosensible.
- Hyalinose Segmentaire et Focale (HSF) : dépôt hyalin (focal et segmentaire) au niveau des glomérules.
- Les causes secondaires :
- Glomérulopathie Extra-membraneuse (GEM)
- Glomérulopathie Lupique
- Amylose
- Néphropathie diabétique
Différents types de dépôts hyalins au niveau du glomérule




Prise en charge du Syndrome néphrotique
Devant un syndrome néphrotique, la prise en charge s’oriente suivant deux volets : un traitement symptomatique et étiologique.
Pour la prise en charge symptomatique, on peut donc procéder à :
- Restriction hydrosodée : pour éviter les œdèmes
- Diurétiques de l’anse
- Néphroprotection : IEC (Inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’Angiotensine) et ARA II (Antagoniste des récepteurs à l’angiotensine II)
- Les IEC et les ARA II diminuent la protéinurie et baissent la tension artérielle.
- Lutter contre les thromboses : héparine et AVK si Albumine <20g/l
Le traitement étiologique vise à traiter la pathologie en cause du syndrome, il peut s’agir des lésions glomérulaires minimes qui sont cortico-sensibles, d’une HSF… (cfr. Les étiologies citées plus haut) voire des pathologies hématologiques comme une maladie de Kahler (Myélome multiple).
Conclusion
Les néphropathies glomérulaires constituent une situation pathologique particulière pouvant s’exprimer sous divers syndromes, eux-mêmes dus à des étiologies primitives ou secondaires d’une maladie générale.
Le syndrome néphrotique chez l’enfant est le plus souvent dû à des lésions glomérulaires minimes pour lesquelles la corticothérapie constitue le traitement de référence. En cas de cortico-résistance, une PBR est indiquée pour une recherche étiologique plus approfondie.
Les indications et contre-indications de la PBR sont à respecter strictement.
Sources
- EDN- ECNi, Les référentiels, Néphrologie
- Cours de Néphrologie, Pr. Ouzedoun, Faculté de Médecine et Pharmacie de Rabat (2023-2024)
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